Résistants et Résistantes Juives
arrêtés après l'insurrection du Ghetto de Varsovie.
« My nie chcemy ratować życia. Żaden z nas żywy z tego nie wyjdzie. My chcemy ratować ludzką godność » (Nous ne voulons pas sauver notre vie. Personne ne sortira vivant d'ici. Nous voulons sauver la dignité humaine) - Arie Wilner (pseudo Jurek), soldat de la ŻOB.
Extrait du témoignage de Paula
Borenstein sur le ghetto de Vilno.
Dans le ghetto, une résistance s’organise.D’abord le FBO, les
partisans unifiés, toutes les tendances politiques, les sionistes,
les communistes, les bundistes, tout le monde a essayé de lutter
ensemble. Notre résistance, c’était une école, un jardin
d’enfants, une chorale (j’étais dans une chorale, nous étions
une vingtaine au début, jusqu’au jour où je me suis trouvée
toute seule avec notre professeur). Il y avait un théâtre, un
orchestre. Nous avons essayé de lutter, de vivre, de survivre. Je
n’ai jamais su et j’ai demandé après, aux jeunes filles de
14,15 ans, de 16 ans qu’est-ce que vous avez ressenti dans un monde
normal quand vous avez eu cet âge, quel était votre rêve, à quoi
vous avez pensé. Moi, j’ai pensé à manger, j’avais faim. Avoir
faim, c’est horrible. J’ai rêvé quand on me demandait :
"qu’est-ce que tu va faire si tu survis à la guerre ? "
mon rêve était : je voudrais travailler dans une boulangerie
et avoir cette odeur de pain frais dans les narines.
Le ghetto de Wilno, sert de prélude à trois camps de
concentration auxquels j’ai survécu, la seule de toute ma famille.
En premier, mon frère a été pris, en deuxième ma soeur avec son
enfant. Jusqu’à la liquidation du ghetto, nous étions dans une
toute petite chambre, avec un seul lit qu’on a donné à la mère
(qui est devenue blanche, qui a perdu ses dents). Elle n’a pas
travaillé. Mon père et moi travaillions. Comme je l’ai dit, en
travaillant, en faisant le ménage, en faisant la cuisine, je volais.
On a appris à voler, on a appris à haïr, on a appris à ne pas
être objectif et cela, c’est la tragédie de ce que la guerre a
fait de nous. J’ai volé des pommes de terre pour nourrir ma mère
qui ne travaillant pas, n’avait pas droit au certificat jaune (le
gelbe Arbeitsscheine) qui vous donnait le droit de manger. J’ai
donc volé des pommes de terre et à la porte du ghetto, la police
lituanienne, le SS et à l’intérieur du ghetto, la police juive,
nous contrôlaient et nous enlevaient cette pomme de terre ou cette
carotte ou ce qu’on a pu voler pour nourrir la mère qui n’avait
pas le droit de vivre.
Dans le ghetto, le ravitaillement était seulement pour 12.000
personnes et celles qui étaient en plus, attendaient, les yeux
affamés, que ceux qui travaillaient à l’extérieur et qui
n’étaient pas contrôlés, puissent leur apporter quelque chose.
Le 23 septembre 1943, c’est la Liquidation du Ghetto, la
sélection, le transfert. Je suis restée avec ma mère et mon père
et on nous a amené à la Gestapo. Tous ceux qui furent conduits hors
du ghetto passèrent la sélection. Ma mère était dans la colonne
de gauche, moi dans celle droite, mon père fut mis à part.
Nous étions obligés par les Allemands de regarder comment trois
personnes furent pendues. Ce sadisme était épouvantable. Parmi ces
trois personnes, une était à l’école avec moi et elle a crié
"Les enfants ! ceux de vous qui resteront en vie, racontez
au monde ce qu’on a fait de nous et pourquoi, pourquoi, quel crime
nous avons commis, nous sommes seulement nés juifs" et nés
dans des endroits où l’on n’a pas voulu de nous.
Je vais seulement finir avec le fait que je ne veux jamais
oublier. Il manque une génération entière d’enfants de 0 à 7,
8, 9 ans : ils étaient petits et incapables de travailler, ils
ont été tués. Si vous connaissez des survivants de la Shoah, vous
trouverez rarement des gens qui sont plus jeunes que nous et la
vision cette génération me suit et me suivra jusqu’à la fin de
mes jours.
Pessah, Pâque chez les juifs, est l’occasion d’un repas
appellé le seder où l’on mange du pain azyme. La dernière Pâque
dans le ghetto et dans ce trou du ghetto, où mon père, ma mère et
moi sommes restés, il y avait une pomme de terre sur la table. Pour
la Pâque, pour ce repas, le juif le plus jeune pose quatre
questions. Pourquoi cette nuit est différente des nuits de tous les
jours de l’année ? Mon père Haïm m’a dit : "
Pessah. Mon enfant, à la maison, chez nous, c’est toi la plus
jeune qui a posé les quatre questions pour Pâque, aujourd’hui,
mets une cinquième question. Pourquoi ? Pourquoi ? "
et c’est pourquoi cette question accompagne toute ma vie, et avec "
c’est pourquoi ? ", je finirai mes jours, car notre
génération est à la fin de la route.
En voyant les jeunes dans la salle, votre génération est si
importante pour nous, vous remplacez les enfants qui vont toujours
nous manquer.
J’ai fait une promesse à Assia quand on l’a pendue : si
moi, je survis, je vais me dévouer toute ma vie, aux êtres humains.
Je l’ai fait grâce au fait que je travaille pour une organisation
humanitaire depuis cinquante ans, c’est elle qui m’a aidée quand
je suis arrivée à Paris, par hasard.
Je vous aime tous parce que vous voulez savoir, et vous voulez
faire quelque chose. On vous aime et on vous demande : n’oubliez
jamais. Luttez autant qu’il faut. On a parlé de Le Pen, Le Pen qui
a dit que ce n’est rien. Mon père, ma mère, mon frère, ma soeur,
leurs enfants, ce n’est rien.
Merci de nous avoir écouté, merci de continuer à vous
intéresser, merci d’apprendre à vos jeunes, vos élèves, tout ce
par où le monde est passé.
L'intégralité du témoignage de Paula et d'autres voix , ici
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